Futur(s) | Le futur de la grande distribution et du petit café
"Un café latte s'il vous plait" "Désolé, je n'ai pas compris votre demande. Pouvez-vous répéter ? "Un ca-fé-la-té"...
On me faisait remarquer cette semaine que le café était une constante dans cette newsletter. Il sera même le sujet central de celle-ci. Car le café est pour moi ce plaisir un peu coupable, rituel de travail, dont on sait qu'il ne pourra sûrement pas durer éternellement. Un symbole en soi de nos paradoxes (des miens surtout en l'occurence :)...
Bonne lecture !
Fiction | Contes du Futur
L'actualité du futur, inspirée par le présent, ses tendances et ses signaux faibles.
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"Un café latte s'il vous plait"
"Désolé, je n'ai pas compris votre demande. Pouvez-vous répéter ?
"Un ca-fé-la-té"
"Désolé, je n'ai pas compris votre demande. Pouvez-vous répéter ?
Vous tapez un grand coup sur le robot grimé en garçon de café à l'air vaguement italien.
(Sur le mythe de l'IA et des robots qui remplacent les hommes et femmes : et si nous n'étions pas plutôt en train de nous adapter fortement à la machine en proposant une version simplifiée du monde et de nous-mêmes que la machine puisse comprendre?)
Vous partez, énervé.e, et encore dans le brouillard matinal. Vous vous dirigez vers la première boutique indiquant "café" dans son enseigne.
Vous poussez la porte, et là, magie, vous avez l'impression de revenir dans votre jeunesse. Une ambiance café avec des gens qui discutent et des serveurs qui s'agitent. Une femmes souriante vous accueille :
"Bienvenue, que puis-je faire pour vous ?"
Vous vous demandez s'il s'agit d'un androïde super réaliste, et si vous allez encore devoir hacher et sur-articuler votre réponse. Mais la jeune femme semble lire vos émotions comme un humain le ferait.
" Oui, je suis bien humaine. Vous voici dans un coffee-social-experience-shop. Ici, nous pensons que boire un café devrait être amusant, et convivial. Le contact est très important pour nous.
Si vous souhaitez discuter, vous pouvez vous adresser à Milo, notre expert conversation."
Elle pointe du doigt un homme au sourire communicatif.
(Sur une chaîne de supermarché hollandaise qui a réservé une caisse dans son magasin pour ceux qui veulent papoter)
Voilà qui vous intrigue, mais qui vous angoisse aussi légèrement. Tout cela parait bien complexe et quelque peu imprévu.
"Quel café souhaitez-vous ? Nous venons de torréfier des grains en provenance du Nicaragua. Fraîcheur garantie"
"Ah oui, ça c'est pas mal"
"Je vous amène ça tout de suite. Installez-vous où vous voulez, j'arrive"
"Où je veux... Tiens tiens..."
Après avoir longuement hésité, votre choix se porte vers un fauteuil près de la baie vitrée du magasin. Le genre de places que l'algorithme réserve en général aux gros consommateurs.
(Sur l'économie du café en train de devenir premium et avec une exigence locale forte.
Sur le user-friendly comme piège intellectuel, ou comment réduire tout effort dans les parcours est le corollaire du contrôle et de la surveillance)
Bien installé.e dans votre siège, vous vous sentez à l'aise, comme cela ne vous était pas arrivé depuis longtemps.
Vous souriez en attendant votre café. La jeune femme se dirige vers vous avec une tasse fumante.
"Voici votre café. Cela fera 12 euros."
Un peu salée l'addition, mais l'expérience a un prix !
(Sur le sentiment de plus en plus répandu de se sentir à la maison ailleurs que chez soi, Ikea creuse la tendance)
Décodage | Le nouveau normal
Les tendances, usages et business qui passent de la marge au normal
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L'automatisation du passage en caisse est une des des traductions des tâtonnements de re-positionnement de la grande distrib.
Focus sur un secteur en pleine mutation.
L'hypermarché, un modèle des Trente Glorieuses
L’hypermarché voit le jour en 1963, à une époque où les besoins de la classe moyenne sont homogènes.
Le premier magasin est un Carrefour, à Saint-Geneviève-des-Bois. Le concept est assez proche de ce que l’on connait aujourd’hui, à savoir de nombreuses références pour en faire le lieu principal de dépenses des ménages (un hypermarché compte environ 200.000 références)- et beaucoup de places de parking :)
(crédit : Carrefour)
Aujourd’hui, alors que les besoins et attentes deviennent de plus en plus fragmentés, le modèle de l’hypermarché doit évoluer.
Un modèle économique chahuté
Les dépenses alimentaires des Français se stabilisent depuis plusieurs années, la fréquentation des hypermarchés baisse, alors que les surfaces de vente n’ont cessé d’augmenter. On sent le plateau du modèle - et la rationalisation- poindre.
Accroitre ses capacités à vendre est le modèle de croissance de l'industrie. L'expansion par les mètres carrés trouvant aujourd'hui ses limites, le nouvel eldorado est dans l’expansion par les horaires.
C'est ainsi que des magasins ouvrent sans personnel, uniquement avec des caisses automatisées et des vigiles le dimanche après-midi.
La perte de confiance : le problème de fond
La grande distribution catalyse l'évolution de notre rapport à la consommation, qui est aujourd’hui pour une partie de la population une manière d’agir selon ses valeurs. Basée initialement sur un modèle standardisé, elle a perdu son positionnement fédérateur et devient un objet de rejet.
Refuser de passer aux caisses automatisées (7% des clients n'utilisent que les caisses automatisées), privilégier des filières courtes, fuir les tentations marketing, arrêter de perdre du temps... Autant de combats que les consommateurs choisissent de mener en fonction de leurs convictions.
Ce positionnement initial est même devenu un piège pour la grande distribution alimentaire. En dépit de ses annonces répétées, elle n'arrive pas à convaincre de son engagement dans la transition alimentaire (cf le graph ci dessous issu de l'obsoco).
La fragmentation des besoins appelle des réponses spécifiques
Si l'on se fie aux derniers chiffres de performance, les enseignes avec un positionnement "prix bas" sont celles qui arrivent à tirer leur épingle du jeu (Lidl et Leclerc). Voilà un premier segment qui s'affirme.
Le succès des enseignes spécialisées dans le bio est également une traduction de cette polarisation, auprès de consommateurs qui rejettent le modèle d'hypermarché.
Le bio en grandes surfaces est un marché de 5 milliards d'euros, en croissance de 20%. Pourtant, cette croissance est alimentée par une cible concentrée : 20% des foyers sont des gros acheteurs de bio, et ils représentent 66% des dépenses.
D'autres acteurs essaient de conserver leur ADN de généraliste tout en introduisant de la personnalisation grâce à la data. Une interview intéressante de AOC pour comprendre la stratégie de Carrefour.
La tendance des circuits-courts et de l'authenticité remet le marché et les petits producteurs dans la course
Le drive trouve son public auprès des aficionados de l’optimisation du temps. Juste devant Amazon, et son assortiment incroyable de références accessibles 24h/24.
Autre segment pour lequel les besoins sont spécifiques : les zones rurales. Le format container complètement automatisé est-il la contrepartie pour conserver des commerces de proximité ?
Ce qui est sûr, c'est qu'il y aura autant de formats que de segments, voire de niches. Ce qui implique un changement de modèle profond.
Ca va être passionnant, ce passage de la grande distribution à la distribution fragmentée :)
Réel | Le présent du travail
Mes articles préférés pour trouver sa place dans un monde du travail bouleversé et bouleversant
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👉 On rêve tous de développer son charisme. Quelques conseils glanés ici : Etre présent.e dans le moment, avoir confiance en soi, et être chaleureux.se. Voilà les piliers, à vous de trouver votre propre style de charisme, sans non plus en faire des tonnes :)
👉Comment revoir toute son organisation de travail pour travailler en remote/télétravail ? Les conseils de ceux qui expérimentent cette manière de
travailler dans des organisations qui l'intègrent nativement. Les idées que j'aime bien :
1/ On ne peut envisager une trajectoire de carrière uniquement dans les entreprises où c'est le mode de travail principal
2/ Savoir bien écrire est une des compétences clés pour réussir. La communication asynchrone est en effet la norme.
3/ On peut enfin gérer sa journée en fonction de ses pics d'énergie
A très vite,
Noémie
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Je suis Noémie Aubron, fondatrice de La mutante et business designer. Je collabore avec les organisations pour construire leur stratégie de réinvention et leurs relais de croissance de demain.
Cette newsletter de design fiction donne des éclairages sur le présent, ses tendances et ses signaux faibles pour naviguer dans la complexité de notre époque.
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